Mardi 09 juin 2009
Soir
Hôtel Partenay Club (Manakara)

Je pense que nous sommes venus à Madagascar pour vivre des expériences comme celle d’aujourd’hui. Nous avons quitté la région des hautes terres qui s’étend de Tana à Fianar. Nous avions quitté les rizières, les paysages de collines déboisées, des odeurs de fours à brique. Ce soir, nous avons retrouvé l’océan indien, les maisons à toits de palme et les paysages de Sainte Marie. Entre deux, il aurait pu n’y avoir qu’une vulgaire transition et c’est en fait tout un voyage.

Le train bringuebalant démarre laborieusement de la gare de Fianarantsoa et déjà, on sent que ce train est bien plus qu’un moyen de transport. Tout le monde s’arrête pour le regarder passer. Le klaxon tonne régulièrement, pour annoncer son passage. Sur le bord des voies s’enchaînent les coucous des zazas (diminutif de zazakely qui signifie enfant). Ce train transporte des voyageurs mais également des marchandises, depuis que la deuxième motrice ne fonctionne plus. Nous nous arrêtons dans une vingtaine de villages, allant du pâté de maisons à la petite bourgade avec chaque fois comme point commun que ces lieux ne sont reliés au reste du monde que par ce train qui passe 6 fois par semaine (3 fois dans chaque sens…).

Comme tous les malgaches, les gens consomment énormément de riz ici (les malgaches sont les premiers consommateurs de riz au monde reporté au nombre d’habitants, bien entendu !). Dans les montagnes et les forêts de l’est, les surfaces rizicoles sont minuscules et l’approvisionnement en riz ne se fait que par l’intermédiaire du FCE (Fianarantsoa Côte Est) en échange de nombreux fruits, bananes en tête. Pas de train, pas de riz. Le train, enfin, ce sont aussi des voyageurs affamés ou juste curieux de déguster les spécialités locales et là chaque village apporte à l’arrivée du train son lot de spécialités culinaires en tous genres (beignets, légumes, viandes, fruits etc..). Parfois, on trouve également un peu d’artisanat (paniers tressés, chapeaux, colliers de perle ou de graines plutôt etc..). A l’arrivée du train, tout le village est là ou presque. Certains vendent leurs produits, d’autres sont juste là pour profiter du spectacle. On s’arrête, on achète, on vend, on échange puis le train manœuvre pour retirer ou rajouter des wagons de marchandises; ensuite, le train repart jusqu’au village suivant, le tout une vingtaine de fois. Nous ne goûterons que les bananes de peur de relancer nos soucis d’estomac, mais que c’est tentant de tout goûter ! Si vous êtes amenés un jour à prendre ce train (c’est tout à votre honneur), prévoyez beaucoup de petites coupures (100, 200, 500 Ar) car ici, on ne rend pas la monnaie puisque dès que l’on reçoit des sous, on les redépense pour acheter du riz. Les villageois sont pauvres ici. Nous avons fait l’expérience avec une vendeuse de colliers en graines. N’ayant plus de monnaie, nous lui tendons un billet de 5000 Ar (2€) en espérant qu’elle nous rende 4500 Ar. Après avoir ouvert de grands yeux, elle nous fait comprendre que ce n’est pas possible et nous donne alors ses quinze colliers au lieu d’un seul initialement prévu…

Bref, que de belles images de villages qui vivent au rythme du train et dont le violon d’un vazaha musicien devient soudainement un spectacle improvisé…

L’autre grand intérêt de ce voyage réside dans la beauté et la diversité des paysages traversés. Départ à 1200m, arrivée au niveau de la mer et un trajet parfois à flanc de montagne, souvent sur des ponts ou sous des tunnels avec en toile de fond, la montagne, la forêt primaire encore préservée, des collines sauvages, les bananiers, les ravinalas (arbre du voyageur, symbole de Madagascar), des cascades et autres rivières somptueusement sauvages et dont les villages ne sont jamais loin.

Malgré tout cela, le voyage fût quand même long et éprouvant. 10H de train pour parcourir 170km avec arrivée de nuit à Manakara. Après avoir refusé les pousse-pousse à la sortie de la gare (il n’y a pas de taxi ici…), nous marchons à la lueur de la lampe dynamo pour rejoindre notre hôtel, 2 km plus loin. Très classe d’ailleurs cet hôtel Partenay Club… avec baignoire d’angle dans le bungalow et langouste au menu…

Un bon bain, un tour dans le journal de bord et on se couche avec le bruit des vagues…